lunedì 22 luglio 2013

DU GOUVERNEMENT DE L'AME - S. Bonaventure


1221-1274 – Bonaventura – Du Gouvernement de l'ame. 
DU GOUVERNEMENT DE L'AME. 
OEUVRES SPIRITUELLES 
DE 
S. BONAVENTURE 
De l'Ordre des Frères Mineurs, Cardinal-Évêque d'Albane, 
TRADUITES 
PAR M. L'ABBÉ BERTHAUMIER, 
CURÉ DE SAINT-PALLAIS. 
TOME DEUXIÈME 
PARIS. 
LOUIS VIVÈS, LIBRAIRE - ÉDITEUR, 
RUE CASSETTE, 23 
1854. 
Beaugency. Imprimerie de GASNIER 
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DU GOUVERNEMENT DE L'AME. 


Avant tout, ô âme! il est nécessaire que vous ayez du Dieu très-bon les sentiments les plus élevés, les plus pieux et les plus saints; ou autrement, vous devez croire en lui avec une foi inébranlable, le considérer avec un esprit attentif, et arrêter sur lui avec admiration l'oeil pénétrant de votre raison. Or, vous aurez de Dieu les sentiments les plus élevés si, fixant sur lui vos regards avec fidélité, réflexion et amour, vous croyez que son immense puissance conserve toutes choses après les avoir tirées du néant, que sa sagesse infinie gouverne et ordonne tout, que sa justice éternelle 

embrasse tout et rend à tous selon les droits de chacun. Vous aurez, dis-je, de lui de tels sentiments, si ce spectacle vous plonge dans l'admiration, si vous vous efforcez d'en connaître les merveilles, si, sortant de vous-même, et cependant rentrant en vous et vous élevant au-dessus de vous, vous vous écriez en toute vérité: «Seigneur, les filles de Juda ont 
tressailli de joie à cause de vos jugements, parce que vous êtes le Seigneur Très-Haut qui avez l'empire sur toute la terre, et que vous êtes élevé au-dessus de tous les dieux (1).» 
Vous aurez de Dieu les sentiments les plus pieux. si vous admirez, si vous embrassez, si vous bénissez 


1 Ps.96. 


sa miséricorde comme s'étant montrée pleine d'une charité souveraine en s'unissant à notre humanité et à notre 
mortalité; pleine d'une tendresse inépuisable en se soumettant aux tourments de la croix et à la mort; pleine enfin d'une 
libéralité sans mesure dans l'envoi de l'Esprit-Saint, dans l'établissement des sacrements, et dans la communication sans 
réserve qu'elle nous fait de notre Dieu lui-même au sacrement de l'autel. Vous aurez, dis-je, de tels sentiments si ces 
considérations vous portent à vous écrier du fond du coeur: «Le Seigneur est bon envers tous, et ses miséricordes 
s'étendent sur tous les ouvrages de ses mains. Que toutes vos oeuvres vous louent donc, ô Seigneur! et que vos saints 
vous bénissent (1).» 
Vous aurez de ce même Dieu les sentiments les plus saints si, reconnaissant son inexplicable sainteté, vous 
l'admirez, la louez, et vous écriez avec les Séraphins: «Saint, saint, saint est le Seigneur (2)» Il est saint d'abord en ce 
qu'il possède en lui-même une sainteté si souveraine et si parfaite qu'il est impossible qu'il puisse vouloir quelque chose 
qui ne soit pas saint. Il est saint ensuite en ce qu'il aime si parfaitement la sainteté dans les autres qu'il ne saurait jamais 
retirer les dons de sa grâce, ni refuser les récompenses de la gloire à ceux qui conservent véritablement la sainteté. 
Enfin, il est saint en ce qu'il a une telle horreur pour ce qui est opposé à la sainteté, qu'il ne pourrait jamais voir sans indignation 

1 Ps. 144. — 2 Is., 6. 

le péché, ne point le réprouver, ni le laisser impuni. Si vous avez de lui de tels sentiments, vous chanterez avec le saint 
Législateur de son peuple: «Dieu est fidèle dans ses promesses, il est éloigné de toute iniquité; il est rempli de justice et 
de droiture (1).» 
Tournez ensuite les regards de votre esprit vers la loi du Seigneur qui vous ordonne d'offrir au Dieu très-haut 
un coeur humble, au Dieu très-pieux un coeur dévoué, au Dieu très-saint un coeur sans tache. Or, vous offrirez au Dieu 
très-haut un coeur humble par le respect de votre âme, l'obéissance de vos actions, la glorification de son nom en vos 
paroles et en toute votre personne; en un mot, en agissant de telle sorte que, selon la règle et la doctrine de l'Apôtre, 
vous fassiez tout pour la gloire de Dieu (2)» 
Vous offrirez au Dieu très-pieux un coeur plein de dévotion en lui parlant par de ferventes prières, en le 
goûtant en de suaves méditations, en lui adressant de fréquentes actions de grâces, et en faisant ainsi monter en tout 
temps votre âme jusqu'à lui à travers le désert comme une vapeur d'aromates, de myrrhe et d'encens, selon que nous le 
lisons de l'Épouse des Cantiques (3). 
Vous offrirez enfin à votre Epoux très-saint un coeur sans tache si ce coeur demeure étranger par la pensée, 
l'affection et le consentement, à tout plaisir de la chair; si aucun amour pervers et terrestre n'y trouve place, et si, rejetant 
loin de vous toute souillure du péché, vous pouvez vous écrier avec le 

1 Deuter., 32. — 2 I. Cor., 10. — Cant., 5. 

Prophète: «Que mon coeur se conserve pur dans la pratique de vos ordonnances pleines de justice, afin que je ne sois 
point dans la confusion (1).» Considérez donc avec attention et voyez si vous avez observé toutes ces choses depuis votre enfance. Si vous 
trouvez qu'il en a été ainsi, ne vous en attribuez pas le mérite, mais renvoyez-en la gloire à Dieu, et rendez-lui-en grâces. 
Si, au contraire, il vous est arrivé d'avoir manqué une ou plusieurs fois en un seul ou plusieurs points ou même en tous, 
soit gravement ou légèrement, soit par faiblesse ou négligence, ou de science certaine, alors appliquez-vous à vous 
réconcilier avec Dieu par des gémissements inénarrables. Et afin de pouvoir lui offrir la satisfaction qui lui est due, 
armez-vous d'un tel esprit de courage que vous puissiez dire et chanter en toute vérité avec le roi pénitent: «Je suis 
préparé à souffrir tous les châtiments, et ma douleur est continuellement devant mes eux (2).» 
Or, la douleur, afin de purifier l'âme et satisfaire à Dieu, doit avoir deux compagnes: la crainte des divins 
jugements et l'ardeur des saints désirs. Par la crainte vous recouvrerez un coeur humble; par les désirs un coeur fervent, 
et par les pleurs un coeur exempt de tache. 
Craignez donc les jugements de Dieu, qui sont un abîme sans fond. Craignez beaucoup, dis-je, de déplaire 
encore au Seigneur, bien que vous ayez déjà marché dans le chemin de la pénitence. Craignez 

1 Ps. 118. — 2 Ps. 37. 

encore plus de retomber dans le péché. Craignez par-dessus tout d'être séparée à la lin de Dieu, d'être privée pour 
toujours de sa lumière, de brûler dans le feu éternel, d'être consumée par le ver qui ne mourra point, si par une pénitence 
véritable vous ne sortez de cette vie dans la grâce, et ainsi écriez-vous avec le Prophète: «Percez mes chairs de votre 
crainte, car vos jugements me remplissent d'effroi (1).» 
Pleurez aussi et soyez dans la peine à cause des péchés que vous avez commis. Pleurez beaucoup 
l'anéantissement de tous les biens reçus du ciel; pleurez encore plus l'outrage fait à Jésus-Christ descendu pour vous sur 
la terre, attaché pour vous à une croix, mais pleurez par-dessus tout le mépris dont Dieu a été l'objet lorsque vous avez, 
en transgressant ses lois, déshonoré sa majesté, renié sa vérité, offensé sa bonté, lorsque vous avez, en vous opposant à 
ses desseins, à ses volontés et à ses jugements, affaibli, défiguré, bouleversé l'ordre universel par l'abus que vous avez 
fait de tout ce qui vous était soumis à cause de Dieu, par l'abus de la nature, des saintes Ecritures, de la justice, de la 
miséricorde, des dons gratuits, des récompenses promises. Considérez attentivement toutes ces choses, et pleurez avec 
amertume comme on pleure la mort d'un fils unique. Que vos larmes coulent comme un torrent le jour et la nuit; ne souffrez aucun repos et ne donnez en ce point aucun sommeil à vos yeux. 
Néanmoins ne cessez point de désirer les dons

1 Ps. 118. 

célestes du divin amour, et élevez-vous vers le Dieu qui a souffert vos péchés avec tant de patience, qui vous a attendue avec tant de longanimité, ramenée à la pénitence avec tant de miséricorde, en vous accordant le pardon, en répandant sa grâce en vous, en vous promettant la couronne. Mais ayez soin pour cela de lui offrir, ou plutôt, pour que vous le puissiez véritablement, qu'il vous donne lui-même de lui offrir le sacrifice d'une âme brisée par la douleur, d'un cœur contrit et humilié; le sacrifice d'une componction pleine d'amertume, d'une confession sincère, d'une satisfaction proportionnée à vos offenses. Désirez, dis-je, avec ardeur que Dieu vous montre son amour en vous communiquant 
largement son Saint-Esprit. Désirez avec plus d'ardeur encore d'être conforme à sa volonté par une imitation parfaite de Jésus crucifié. Mais désirez par-dessus tout la possession entière de Dieu par la vision sans nuage du Père éternel, et que ce désir soit tel que vous puissiez vous écrier avec le Prophète: «Mon âme a soif du Dieu fort, du Dieu vivant. Quand viendrai-je et paraîtrai-je devant la face de mon Dieu (1)?» 


Si vous voulez acquérir intérieurement cet esprit de vie, de crainte, de douleur et d'amour, ayez soin de vous exercer en toute occasion au-dehors à la modestie, à la justice et à la piété, de telle sorte que, selon l'enseignement de l'Apôtre, renonçant à toute iniquité et à tous les désirs terrestres, votre vie en 



1 Ps. 41. 


ce monde soit une vie de tempérance, de justice et de piété (1). 

Ainsi, exercez-vous à la modestie en tout genre, et que, selon la doctrine du même Apôtre, «votre modestie soit connue de tout le monde (2).» Exercez-vous à une modestie d'économie dans la nourriture et le vêtement, dans le sommeil et les veilles, sans jamais excéder en rien; à une modestie de conduite, en modérant votre silence et vos entretiens, votre douleur ou votre joie, votre douceur ou votre sévérité, selon que le besoin l'exige et que la droite raison l'indique. Exercez-vous à une modestie d'honnêteté, par la dignité, la convenance et le bon ton dans vos actions, vos mouvements, vos gestes, vos vêtements: ou autrement dans tout votre extérieur, dans vos membres, dans vos sens, selon que l'honnêteté morale ou l'observance régulière le demande, et agissez en cela de telle sorte que vous soyez digne de compter au nombre de ceux à qui l'Apôtre dit: «Que parmi vous tout se passe selon l'ordre et l'honnêteté (3).» 


Exercez-vous aussi à la justice, afin qu'on puisse avec raison vous adresser ces paroles du psaume: «Régnez à cause de la vérité, de la douceur et de la justice que vous possédez.» Exercez-vous, dis-je, à une justice intègre par le zèle du divin amour, par l'observance de la loi de Dieu, par le désir du salut de vos frères; à une justice d'ordre par 

l'obéissance à vos supérieurs, par l'union avec vos égaux, par la 

1 Ad tit. 2.— 2 Philip., 4. — 3 I Cor., 14. 

vigilance sur Nos inférieurs; à une justice parfaite par l'adhésion à toute vérité, par l'amour de tout ce qui est bien, par lahaine de toute méchanceté, et cela non-seulement en votre coeur, mais en vos paroles et en vos actions, ne faisant jamais à personne ce que vous ne voudriez pas vous être fait, ne refusant jamais à un autre ce que vous verriez avec 
peine vous être refusé. Vous serez de la sorte une imitatrice parfaite de ceux à qui il a été dit: «Si votre justice n'est plus abondante que celle des Scribes et des Pharisiens, vous n'entrerez pas dans le royaume des cieux (1).» 


Enfin, exercez-vous à la piété, car l'Apôtre a dit: «La piété est utile à tout: elle a pour elle les promesses de la 

vie présente et celles de la vie future (2).» Exercez-vous, dis-je, à la piété qui a pour but le culte divin, apportant une 
vive attention, une dévotion sincère et un respect profond à réciter les heures canoniales, à confesser chaque jour et à 
pleurer vos péchés, à recevoir la très-sainte Eucharistie aux temps marqués et à entendre tous les jours la messe; à la 
piété qui a pour but le salut des âmes, en leur venant en aide par des prières fréquentes, par de bonnes exhortations, et 
par la prédication de vos saints exemples, en sorte que celui qui vous entend s'écrie: «Je marche à votre suite.» Agissez 
cependant en cela avec une sagesse telle que votre propre salut n'en éprouve aucun dommage. Exercez-vous à la piété 
qui a pour but le soulagement des 


1 Mat., 5. — 2 I Tim., 4. 


souffrances corporelles, en les supportant avec patience, en leur prodiguant les consolations avec tendresse, en leur 
venant en aide avec humilité, avec joie et compassion. C'est ainsi que vous serez parfaite en la loi divine, car l'Apôtre a 
dit: «Portez les fardeaux les uns des autres, et de la sorte vous accomplirez la loi de Jésus-Christ (1).» 


Maintenant, si vous voulez mettre en pratique tout ce que je viens de vous indiquer, je crois que le moyen le plus puissant, c'est de vous souvenir sans case de Jésus crucifié, c'est de porter en tout temps votre Bien-aimé, comme un bouquet de myrrhe, sur votre coeur (2). Daigne vous accorder cette grâce celui qui est béni dans tous les siècles. 

Ainsi soit-il. 


1 Galat., 6. — 2 Cant., 1.


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